Histoire
Le seigneur de Citry, GASTON de RENTY, fonde Montréal au Canada.
La place située face à la mairie et à l’école porte le nom de Gaston de Renty.
Mais qui était cet homme né en 1611, mort en 1649 et qui repose dans la crypte de l’église de Citry ?
Il fut seigneur de Citry et sa mémoire reste attachée à son engagement auprès des pauvres et des malades. Le début du 17e siècle où il vivait, fut en effet une période agitée et douloureuse pour le peuple et les paysans partout en France, comme en Brie. Bien des évènements obscurcissaient le contexte social et politique : la sortie des guerres de religions, l’instabilité du pouvoir royal (Henri IV venait d’être assassiné et Louis XIII n’avait que 10 ans en 1611), les guerres revenaient sans cesse et le climat s’était brusquement refroidi (les historiens appellent cette période « le petit âge glaciaire »), sans parler du retour de la peste dans les années 1630. De grandes surfaces agricoles n’étaient plus cultivées faute de bras et la production agricole ne parvenait plus à nourrir toute la population. De graves famines décimaient la population et favorisaient les épidémies.
Trouver un monde meilleur s’installait dans l’esprit d’hommes et de femmes qui préférèrent quitter la France, pour tenter leur chance dans les contrées lointaines du Nouveau Monde, comme on appelait alors le continent américain (le Canada avait été découvert en 1534 par Jacques Cartier). La monarchie incitait d’ailleurs ceux qui le désiraient à prendre la mer pour peupler les vastes territoires de l’Amérique du Nord que la France tentait de s’accaparer pour contrecarrer l’Angleterre.
Des administrateurs civils, militaires et religieux étaient envoyés pour organiser la colonisation de ces nouvelles terres lointaines dont on pouvait tirer profit. C’est ainsi que le seigneur Gaston de Renty devint administrateur de la Société de Notre-Dame de Montréal qui gérait le recrutement des « engagés » vers la ville de Montréal et les immenses territoires américains perçus comme libres. Il organisa le recrutement et le départ de ces centaines de personnes vers le Canada, volontaires et parfois « forcées », qui signaient à Dieppe un contrat de travail de trois ou cinq ans avec un employeur de Montréal, en échange d’un petit pécule et d’un trousseau.
Le voyageur emportait linge et outils dans des coffres pour les plus riches et un simple baluchon pour les plus pauvres. Le voyage de Paris au port de la Rochelle durait 18 jours et la traversée de l’Atlantique jusqu’au Canada prenait, selon les vents, deux à trois mois. Les femmes venues de France étaient souvent mariées dès leur arrivée aux soldats du roi. Ce qui attendait tous ces immigrés était à nouveau des épreuves. Les hivers canadiens n’avaient rien à voir avec les frimas d’Ile-de-France et des guerres incessantes existaient aussi, opposant les « engagés » venus de France aux Anglais et leurs alliés amérindiens. À la fin de leur contrat, certains choisirent d’ailleurs de rentrer en France. Les plus endurants ou ceux qui étaient parvenus à disposer de concessions de terres, firent souche, tandis que d’autres, encore plus audacieux, couraient les bois pour alimenter le commerce de la fourrure, explorant librement l’immensité du continent nord- américain.
Ainsi au 17èmesiècle, des habitants de la Brie, habitants de Bassevelle, de Saâcy, de Drachy, de La Ferté-sous-Jouarre, de Jouarre, de Meaux etc. contribuèrent à peupler la colonie voulue par le pouvoir royal français et participèrent à la construction de Montréal. L’Ile-de-France, dont la Seine-et-Marne en particulier, devint l’une des principales origines de recrutement et de migration vers le Canada.
Le seigneur Gaston de Renty avait pressenti l’intérêt de la Nouvelle France au point d’aider ses compatriotes à partir vers un monde supposé meilleur. Il prendra ainsi part au peuplement de cet immense territoire qu’est le Canada. Il est considéré comme l’un des fondateurs de Montréal. Ne trouve-t-on pas d’ailleurs une avenue « Gaston de Renty » à Montréal ? Son nom figure sur la plaque des fondateurs de la ville. Cependant, sous Louis XV, la guerre de Sept ans (1756-1763) entre la France et l’Angleterre, ruina en partie les efforts de Gaston de Renty, comme ceux des autres administrateurs. Le Canada fut finalement cédé à l’Angleterre en 1763.
L’évocation trop rapide de l’action du seigneur Gaston de Renty en faveur des colons partis au Canada montre que les mêmes causes sont toujours à l’origine des migrations. L’engagement et l’ouverture d’esprit de cet homme semblent anticiper sur notre époque. Il a éveillé notre curiosité quand actuellement la gestion des flux migratoires semble insoluble pour beaucoup de nations.
Pour en savoir plus :
- « De la Brie à la Nouvelle France, l’émigration en Amérique Française ». Bruno CADORET, éditions Fiacre.
- « Histoire de la France Rurale de 1340 à1780 », tome 2, Georges DUBY, éditions du Seuil.
- Texte remanié par M. Gérard GEIST, professeur d’histoire à la Sorbonne et maire de Sainte Aulde.